Des séries et un homme...
Par Frédéric Urban le mardi, août 28 2001, 14:00 - USA - Lien permanent
Le soleil c’est
à peine levé sur la ville que déjà nous
sommes en route pour Burbank où se trouve la société
Modern Videofilm,
pour laquelle travaille Rodrigo Vidales (mon ami ingénieur,
connu deux ans plus tôt et natif du midi de la France).
Cette
société travaille dans les moyens techniques de films
et séries TV comme Friends
(société, citée par ailleurs dans le générique
de fin de ladite série) et James Cameron a en outre fait appel à cette firme pour certain de ses documentaires.
L’extérieur de la Warner Bros.
Juste en face est déjà un spectacle géant en soit pour tout cinéphile qui se respecte et la chose monopolise mon attention durant plusieurs minutes.
Je remarque un jeune homme qui vient de se faire prendre en flagrant délit et se faire sermonner pour avoir osé filmer l’entrée du studio.
Je m’en
vais rendre visite à celui qui à tant fait pour moi,
un homme simple et généreux.
Une bouteille de vin bien de chez nous à la main, je pénètre
dans le bâtiment aux baies vitrées fumées.
Rodrigo me reçoit dans les locaux de la firme et m’emmène
dans son bureau.
Intimidé, je salue ses collègues qui me sourient et
m’envoient des "welcome" bienveillants.
Je sais que
je serais amené à aller manger avec Rodrigo, mais
aussi que moi seul allait pouvoir entrer dans l’enceinte du studio.
Désolé pour Marc qui en profite pour visiter
les alentours.
Grâce à Rodrigo je réalise un rêve de gamin en me baladant en VIP dans l'enceinte du mythique studio qui a vu se réaliser tant de grands films culte comme l'exorciste.
C'est avec un pass édité pour la journée que je peux pénétrer à l'intérieur et penser alors à toute celles et ceux qui m'ont toujours entendu parler des studios américains depuis tout petit.
J’entre dans ledit studio sans être fouillé ou questionné, puisque accompagné de Rodrigo (chose qui a profondément changé depuis les attentats du 11 septembre de la même année).
Nous allons tous deux mangé dans la cafétéria
où déjeunent généralement les stars
en tournages.
Assis à une table, je vois rentrer deux membres de la série
Urgences,
pour ceux qui connaissent :
Ellen
Crawford (infirmière Lydia Wright) et Alex
Kingston (docteur
Elizabeth Corday - Greene).
Je ne peux,
dès lors, plus me concentrer sur mon sandwich.
Rodrigo s’amuse de me voir si perturbé.
En repassant devant moi, Alex
Kingston me lance un petit sourire qui me transporte d’allégresse.
Rodrigo va
soudain me faire un cadeau inestimable.
Ce dernier, trop affairé, me laisse seul avec pour unique
recommandation de ne pas me faire repérer avec mes appareils
comme un vulgaire touriste (sans péjoration aucune).
Ce qui va suivre ensuite restera alors pour moi un souvenir incroyable
qu’il allait falloir filmer sans quoi, personne ne me croirait
une fois rentré (on filme avant tout pour soi, mais prétendre
qu’on ne le fait pas aussi pour les autres serait mensonge
non ?).
Je ne sais où je vais, mais je tremble un peu.
L’un de mes rêves se réalise et je prends conscience
de ma chance d’être ici, de déambuler, non comme
un touriste dans ces petits trains (touristes à qui on confisque
caméras et appareils photos), mais comme un ouvrier sur son
lieu de travail.
Aucune personne ne semble s’étonner de me voir,
un sac à bandoulière sur l’épaule.
Je prends alors le risque de sortir des sentiers battus et d’aller dans un coin désert du studio où se dresse toute une ville "western" avec ses saloons, son hôtel de ville et son épicerie, qui ont, entre autres, servi de décors à La petite maison dans la prairie.
Je crois soudain rêver lorsque, tout à coup, devant moi : l’entrée de l’hôpital de la série Urgences semble m’appeler, j'ai peine alors à croire que je sois si privilégié.(devant le doc magoo's, cafétéria de la série).
Je suis devant
le Doc Magoo (le snack fétiche des protagonistes
du feuilleton situé devant le Cook County Hospital)
et la minute d’après, me voilà dans le parking
des ambulances (seul, mais sur mes gardes) et devant le panier de
basket avec lequel George
Clooney et Anthony
Edwards ont tant joué au fil des épisodes.
De là, la magie est rompue (pourrait-on croire) à
la vue de tout ce qui est autour et qui fait illusion de ville à
l’écran, mais je suis évidemment fier de me
trouver en ces lieux, conscient que des millions de fans aimeraient
être à ma place.
Je passe ensuite
à coté de ce que les studios nomment "stage",
sorte d’immense hangar qui renferme les décors et plateaux
utilisés lors des tournages et d’ailleurs.
Sur les murs de chacun de ses hangars est fixée une dalle
sur laquelle on peut lire le titre de quelques films tournés
sur place.
Les places de parking réservées à George
Clooney ou Clint Eastwood (dont la maison de production
Malpaso est à l’intérieur de la Warner comme
bien d’autres qui payent en fait un loyer) défilent
sous mes yeux ébahis.
Trop exposé, je ne tente pas de filmer sous peine d’être
mis à la porte et me contente de regarder le château
d’eau peint aux couleurs du studio.
Une soif carabinée
se fait pressante.
Aussi, je me rends à nouveau à la cafétéria
pour y acheter un gobelet de Sprite.
En sortant de là, une de ces petites autos électriques,
dont se servent les golfeurs, me passe sous le nez et je reconnais
immédiatement le chauffeur qui n’est autre qu’Anthony
Edwards, alias le lieutenant Nick 'Goose' Bradshaw
de Top
Gun, mais plus connu pour son rôle du Docteur Green
de Urgences.
En fin stratège, et pour ne pas passer pour un fan exubérant,
je reste là, à observer discrètement ses gestes
alors que ses amis et lui se sont assis à une table pour
déjeuner.
Je ne sais comment aborder cet homme que je suis depuis plusieurs
années à la télé et qui incarne l’un
des personnages préférés des français
dans l’un des feuilletons les plus regardés au monde.
Le temps de faire un tour (et de pénétrer dans des
locaux vides, avec, au plafond des spots suspendus en grappe et
des câbles s’emmêlant par terre) et je me lance.
« - Excuse me mister Edwards…. » je m’exprime
dans un anglais très approximatif, mais mon interlocuteur
comprend fort bien ce que je veux dire et voilà que celui
ci accepte avec plaisir de faire une photo en ma compagnie, en étant
surpris, comme un enfant, de constater les prouesses techniques
de l’appareil photo numérique que j’ai mis entre
les mains de son collègue Marc pour l’occasion.
Non
content d’avoir figé cette rencontre sur compact flash,
je pousse un peu le bouchon en lui proposant de dire bonjour à
mes amis par le biais du caméscope.
Là encore, Anthony
Edwards accepte en souriant, et après un bref moment
de complicité avec Rodrigo (peu de temps avant,
devant la façade extérieure du studio), voici le docteur
Green passant un bonjour au père de ma meilleure
amie.
Galvanisé,
je veux encore aller plus loin et c’est en regardant Edwards
partir au loin que l’idée folle de le suivre fait son
chemin en moi.
Une longue allée, bordée de grands arbres bercés
par le vent, un banc et une fontaine me donnent envie de m’arrêter
un moment pour réfléchir.
Je m’assieds et regarde les gens passer en me saluant.
En face de
moi, Le Central Perk de la série Friends
est en travaux.
Un peu plus loin, je suis agréablement surpris de me retrouver
devant la maison des parents biologiques de Phoebe Buffay
(Lisa
Kudrow).
Oui, mais peut être aussi y a t-il la banqueroute.
Une grande bouffée d’air avalé et hop, me voilà
en route pour je ne sais où, à la recherche de blouses
blanches ou vertes.
Je n’ai
pas à chercher longtemps.
Je me retrouve le souffle coupé devant une porte sur laquelle
est inscrit "E.R." (Urgences
en abréviation).
Dans l’herbe, non loin de là, Laura
Innes (Docteur Kerry Weaver) papote avec une collègue,
alors que derrière moi arrive Noah
Wyle et Alex
Kingston (Docteurs John Carter et Elizabeth
Corday - Greene).
Corday est accompagnée de son agent et porte son bébé
à bout de bras.
Je décide donc de m’approcher de Carter, d’une
gentillesse qui force l’admiration, avec qui je sympathise
très vite (coup de malchance, trop excité par ce que
je suis en train de filmer, je ne vais pas tarder à me rendre
compte, avec amertume et larmes, que je n’avais pas appuyé
sur la touche enregistrement, pouvez-vous imaginer cela ?).
Ce dernier m’avoue déjà qu’il songe à
quitter la série.
Aujourd’hui, celui-ci l’a apparemment officialisé
auprès de certains médias.
Une petite photo au passage avec Maura Tierney (infirmière "Abby" Wyczenski Lockhart).
Les seconds
rôles se succèdent et je vais discuter alors plus de
quinze minutes avec chacun d’eux.
Tout d’abord, le responsable de l’accueil Troy
Evans (pas Jerry mais Franck, râleur
comme pas deux et qui a déjà derrière lui des
rôles dans Phénomène,
Piège
en haute mer ou Fantômes
contre Fantômes), puis l’acteur Vondie
Curtis-Hall qui joua le rôle de Roger McGrath
(nouveau mari de la défunte Carla, beau-père
de Reese, fils du docteur Benton) qui parle bien
le français et que je reconnais car celui-ci a souvent incarné
des rôles de terroriste dans Broken
Arrow ou encore 58
minutes pour vivre.
Je suis assailli de questions par une jeune actrice charmante du nom de Sam Doumit avec qui j’entame une discussion passionnée.
Le charme
opère.
Sam me donne son adresse e-mail (qu’elle inscrit au dos d’un
bout de script inédit, non utilisé dans la série,
sur lequel je constate le retour de Sherry
Stringfield
dans le rôle du docteur Susan Lewis, un scoop à l'époque)
en me disant avec humour que celle-ci vaut de l’or et qu’elle
ne la donne pas au premier venu.
J’en fais de même.
Sam, qui parle
un peu notre langue, traduit alors aux autres acteurs ce que je
dis.
J’en profite alors pour parler de mon futur roman, et ô
joie, la chose intéresse beaucoup de monde.
Soudain, une femme s’approche et lance le coup d’envoi
du tournage de la scène du jour en me demandant poliment
de ne plus utiliser le caméscope (dommage quand je constate
ensuite que je n’ai que les pieds d’Alex
Kingston sur la bande et qui vient de me demander si je
serais encore là dans une heure).
L’épisode
en question est le numéro 4 de la saison 8, en anglais :
Start All Over Again (en
français : Un nouveau départ) dans lequel Sam incarne
une fille enceinte qui va devoir avorter sans que ses parents le
sachent.
Je ne peux pas pour le moment accéder au plateau.
Tout le monde s’en va, mais certains me souhaitent bonne chance.
Sam aussi, mais je m’engage à lui écrire le
plus souvent possible.
A cet instant, je ne sais rien de sa carrière, mais cette
dernière me promet de passer me voir en Alsace dès
que possible.
Aurais-je un ticket avec une actrice américaine ? Possible.
A mon retour
en France, mes recherches sur Internet portent leurs fruits.
Sam est une actrice de théâtre confirmée qui
a joué dans plusieurs autres séries telles que Beverly-Hills,
Dawson
etc…mais est aussi en tête d’affiche d’une
comédie grinçante du nom de The
Hot Chick.
Je m’éloigne
du site pour aller téléphoner à mes amis, mais
comprends avec déception que je n’ai pas ma carte sur
moi.
Que faire? Je sais…demander sa carte à quelqu’un
et justement un homme arrive au loin.
J’ai la sensation de le reconnaitre.
Je suis certain que l’homme qui est en train de me parler
(pour me dire qu’il est désolé de ne pas pouvoir
m’aider) est un célèbre producteur et je lui
en fait part, mais celui-ci se met à rire et me dit qu’il
n’est pas celui pour qui je le prends.
Une fois parti, je vais connaitre la plus douloureuse expérience
de ma vie ambitieuse.
Je prends conscience d’avoir laissé filer une chance
unique.
Ce petit gars aux allures conventionnelles qui s’éloigne
se nomme Jerry
Bruckheimer, qui n’est autre que l’un des plus
grands producteurs de films à gros budgets du monde ( Les
ailes de l’enfer, Armageddon,
Rock,
Ennemis
d’état, Pearl
Harbor, La
Chute du faucon noir, Le
Flic de Beverly Hills, Top
gun, Esprits
Rebelles, etc…). tant pis!
Je reviens une demi heure plus tard sur les lieux de ma rencontre avec l’équipe d’Urgences et, comme si la chance voulait se racheter, je remarque un homme qui a l’air de travailler sur le feuilleton et vais de ce pas tenter de sympathiser avec lui.
Dix minutes plus tard, je suis en train de vivre une chose que très peu de gens peuvent se venter d’avoir faite (journalistes mis à part).
Cette chose, je ne vais pas vous la présenter par écrit mais par images…cliquez les prochain liens et vous verrez ce qu’un simple Alsacien peut faire, armé d’un culot à toute épreuve et d’un peu de bagout bien géré (et par là, je veux dire vous aussi, c’est là tout mon message) :
Les
larmes ont coulés, je ne me contiens plus, car je repense
à mes rêves de gosse et à tous ceux qui se moquaient
de moi.
Je souhaite une bonne fin de journée au vigile de l’accès
d’entrée et m’en vais rejoindre Marc
sur le trottoir d’en face.
Deux filles
absolument exquises s’approchent de nous et Marc
ne s’étonnera pas de me voir leur demander de poser
avec moi le temps pour lui de filmer ce moment amusant.
Les deux filles nous disent venir d’Angleterre et
être respectivement actrice et chanteuse…c’est
cela Hollywood.
Il est grand temps de rentrer maintenant, mais les surprises ne sont pas encore finies pour nous, et principalement pour moi.
A mon retour chez moi, je vais bien sur avoir un jolie article dans la presse: